Recommandations du commissaire

Moderniser les lois ontariennes sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée

Il est plus que temps de moderniser les lois ontariennes sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée. La Loi sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée de l’Ontario et la loi correspondante s’appliquant aux municipalités ont été adoptées il y a 30 ans, et n’ont pas suivi le rythme de l’évolution de la société et de la technologie .

De nos jours, les gens ont des attentes très différentes de celles qu’ils avaient il y a 30 ans quant à la façon dont les institutions publiques utilisent, communiquent et partagent leurs renseignements personnels. Les technologies numériques qui sont à la disposition des institutions et des particuliers ont aussi beaucoup changé. L’intérêt que soulèvent depuis quelque temps les projets de ville intelligente souligne encore plus à quel point le cadre de réglementation actuel de la province est inadéquat pour composer avec les questions touchant la gouvernance des données et la protection du droit à la vie privée.

Notre province marque le pas sur d’autres territoires de compétence au Canada sur cette question, et nous avons du rattrapage à faire. L’Ontario doit renforcer ses lois sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée pour répondre aux exigences de la société moderne et veiller à ce que la population ontarienne jouisse des mêmes droits que celle des autres provinces en matière d’accès à l’information et de protection de la vie privée.

À cette fin , j’exhorte le gouvernement à élaborer une loi ontarienne sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé. Une telle loi, qui serait adaptée au contexte réglementaire ontarien, permettrait d’assujettir à des lois semblables le secteur privé de même que le secteur public. En plus de réduire l’incertitude en matière de réglementation, un régime de surveillance simplifié pourrait se révéler également plus efficace, particulièrement dans le contexte des projets de ville intelligente ou d’autres partenariats public-privé.

Assurer l’expansion du gouvernement ouvert

Depuis que je suis commissaire, le CIPVP s’est fixé comme priorité de soutenir les initiatives de gouvernement ouvert, en encourageant tous les ordres de gouvernement à divulguer les renseignements dont ils disposent. Nous considérons que l’accès à l’information fait partie d’une campagne beaucoup plus vaste en faveur de la transparence des activités du gouvernement et de la reddition de comptes à leur sujet.

Le gouvernement provincial et de nombreuses municipalités ont instauré des programmes de données ouvertes, mais il est temps désormais de repousser les limites de ce qui est actuellement accessible au public. Nous appuyons les initiatives de données ouvertes et la publication gratuite de faits et statistiques. Ces données brutes sont précieuses pour donner un aperçu de différentes activités, mais elles ne sont pas très utiles pour mettre en contexte les processus décisionnels.

Nous devons aller au-delà des données et assurer la publication proactive de renseignements plus complets sur les programmes, services et activités du gouvernement. Il s’agit là des détails contenus dans les notes de service, documents d’orientation et autres documents de planification. Pour les divulguer, les organisations devront passer en revue les exigences stratégiques et juridiques actuelles concernant la divulgation proactive et publier systématiquement certaines catégories générales de renseignements.

Les organisations gouvernementales peuvent également assurer la divulgation proactive des documents faisant l’objet de demandes d’accès ou de documents généraux qui ne comprennent pas de renseignements personnels. Rien ne s’oppose à ce que ces documents soient mis à la disposition de toute la population ontarienne. En publiant des résumés de demandes traitées ou de copies de lettres de décision caviardées, les organisations publiques peuvent réduire le temps, les coûts et les efforts associés aux demandes d’accès, pour elles comme pour les auteurs de demande.

Une approche semblable peut être appliquée aux documents sur les approvisionnements du gouvernement. Au lieu d’attendre de recevoir des demandes, les institutions peuvent publier ces documents de façon proactive. Dans certains cas, il pourrait y avoir des motifs légitimes de ne pas publier certains renseignements que ces documents contiennent. Cependant cela ne devrait pas empêcher l’adoption d’un processus d’approvisionnement plus ouvert. Avec une bonne planification, il est possible de surmonter ces obstacles sans porter atteinte à la transparence.

Publier des statistiques sur la Police provinciale de l’Ontario

La nécessité pour la Police provinciale de l’Ontario d’établir des rapports statistiques distincts a été portée à notre attention à la suite d’une demande d’Amnistie internationale d’enquêter sur la réponse du ministère du Solliciteur général (autrefois le ministère de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels) à une série de demandes d’accès et d’appels.

Amnistie a soulevé précisément le taux de conformité au délai de réponse dans le cas des demandes d’accès à des documents de la Police provinciale de l’Ontario. Les statistiques à ce sujet étaient incluses dans celles de l’ensemble du ministère, de sorte qu’il était difficile d’en faire le suivi.

À la suite de notre enquête sur les préoccupations d’Amnistie, nous avons tiré une conclusion semblable. Chaque année, les services de police de toute la province communiquent leurs statistiques de conformité au CIPVP. En les publiant dans notre rapport annuel, nous permettons au public d’évaluer la réactivité des différents services de police aux demandes d’accès à l’information présentées en vertu des lois sur l’accès à l’information de l’Ontario. Ces statistiques sont également un moyen utile d’observer les tendances d’une année à l’autre.

L’absence de statistiques de conformité distinctes concernant les demandes d’accès à des documents que détient la Police provinciale de l’Ontario crée une lacune importante dans les renseignements dont le public dispose sur la façon dont la police répond aux demandes d’accès à l’information. Pour remédier à cette situation, les statistiques de la Police provinciale devraient être communiquées séparément de celles du reste du ministère.

Imposer aux partis politiques des règles sur la protection de la vie privée

À nouveau, je demande au gouvernement de modifier les lois de l’Ontario régissant la protection de la vie privée pour y inclure la surveillance des partis politiques. Je ne suis pas le seul à m’inquiéter et je me suis joint à mes collègues commissaires pour tirer la sonnette d’alarme sur cette question sur la scène nationale.

La sécurité des renseignements personnels délicats détenus par les partis politiques constitue une menace très réelle au droit à la vie privée des particuliers. Comme l’histoire récente nous l’a appris, les partis politiques peuvent recueillir, partager et analyser des données sur les électeurs comme jamais auparavant, à notre insu.

L’absence actuelle de surveillance signifie que les électeurs de l’Ontario n’ont pas le droit, en vertu de la loi, de savoir si leurs renseignements ont été recueillis ou avec qui ils ont été partagés. Outre les problèmes éthiques évidents que pose cette situation, il existe d’autres dangers. Ce bassin d’informations personnelles non vérifiées est susceptible d’être la cible de piratage informatique et de cyberattaques, et peu d’options s’offrent à ceux dont les renseignements personnels délicats sont exposés lors d’une atteinte à la vie privée.

Les risques touchant la protection de la vie privée, les questions éthiques et la sécurité associés à la collecte et à l’utilisation de renseignements personnels de la part des partis politiques sont trop grands. Ces partis ne peuvent plus continuer d’opérer en marge de la loi; ils doivent répondre de la façon dont ils recueillent, utilisent et divulguent nos renseignements personnels. Il est temps pour le gouvernement de défendre le droit à la vie privée et de modifier les lois ontariennes sur l’accès à l’information et la protection de la vie privée.

 

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